Titus Andronicus – The Most Lamentable Tragedy

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C’est pas très commun d’entendre des disques de rock opéra ces derniers temps. La dernière fois, c’était avec les keupons de Green Day avec American Idiot et 21st Century Breakdown, mais sinon pour le reste, aucun groupe ne s’est vraiment essayé à ce style. C’est alors que Titus Andronicus a décidé de se lancer avec The Most Lamentable Tragedy.

Le groupe punk du New Jersey mené par le chanteur/guitariste maniaco-dépressif et gueulard Patrick Stickles a connu un parcours plutôt honorable avec deux excellents albums qu’étaient The Airing of Grievances en 2008 et The Monitor en 2010 et un troisième Local Business en 2012 plutôt moyen. Signé sur le légendaire label Merge Records en début d’année, la troupe décide de revoir leurs ambitions à la hausse et écrivent donc un rock opéra de 93 minutes composé de 29 chansons intitulé The Most Lamentable Tragedy (hasard ou coïncidence, c’est également le titre d’une pièce de Sheakespeare) qui s’inspire de l’oeuvre de Nietzsche nommé Birth of Tragedy. L’intrigue principale se recentre autour de la dépression de Patrick Stickles, à savoir les luttes d’un personnage maniaco-dépressif qui se bat pour s’en sortir. Durant ce périple infernal, il fera connaissance avec un autre personnage qui s’avérerait être son double dont il doit se défaire (clin d’œil à un certain film finchérien…). Comme je ne suis pas un bâtard, je ne vais pas vous spoiler l’intrigue, je vous laisse écouter l’album en-dessous.

Composé en cinq actes, The Most Lamentable Tragedy voit son lot de morceaux punk-rock bruts de décoffrage (« No Future Part IV: No Future Triumphant », « Stranded (On Your Own) », « Dimed Out », « A Pair Of Brown Eyes », « I’m Going Insane (Finish Him) ») et d’autres titres complètement démesurés et « dramatiques » (« Lonely Boy », « Mr. E. Mann », le springsteenien « Fired Up » et « I Lost My Mind »), le tout compensé par des entractes, des interludes hardcore-punk à la Hüsker Dü et par des passages plus incongrus comme le gospel a cappella de « Auld Lyng Syne » chanté sous l’air de « Ce n’est qu’un au revoir ». Parmi les moments forts, on dénichera également les reprises d' »I Lost My Mind » de Daniel Johnston et d' »A Pair Of Brown Eyes » du groupe folk-rock The Pogues à la sauce Titus Andronicus ainsi que les épopées audacieuses que sont « More Perfect Union » et « (S)HE SAID/(S)HE SAID » durant 9 minutes ou encore la conclusion à l’harmonium (ou à l’accordéon, je sais pas trop) nommée « Stable Boy ». Dommage que Patrick Stickles chante un peu faux par moments sur ce titre.

Il est noté qu’une quinzaine de musiciens a contribué au rock opéra, dont le violoniste Owen Pallett mais il est clair que Titus Andronicus a touché parfaitement sa cible avec The Most Lamentable Tragedy. Un peu dans la lignée de The Monitor où le groupe voulait illustrer une rupture amoureuse en utilisant les métaphores de la guerre civile américaine, ce nouvel album possède le sens de la démesure mais saura se livrer à nous-mêmes au cours d’écoutes répétées, et c’est ce qui fait sa force avant tout. Patrick Stickles a beau être un gueulard mais il arrive sans honte à coucher sur papier sa dépression et ses tourments afin de mieux exorciser sa peine la plus profonde. On parie qu’on entendra beaucoup parler de ce rock opéra autant barré qu’attachant pendant un petit bout de temps cette année.

Note: 9/10