Beauregard 2024

Live-report et photos signé.e.s Martin Sojka.

Connaissez-vous le Festival Beauregard ? Il retrouve tous les ans son écrin de verdure au sein du parc du château du même nom à Hérouville-Saint-Clair, à un jeté de caillou de Caen. Si vous avez suivi nos réseaux sociaux, vous devriez en avoir eu un aperçu au travers des images que nous avons partagées tout au long des 4 jours du festival. Enfin quand on dit 4, c’est en réalité 5 avec le before mais nos obligations ne nous ont pas permis d’en profiter. Qu’à cela ne tienne, nous n’aurons pas la chance de profiter du set de David Guetta et plongerons le jeudi.

Jeudi 4 Juillet – L’arrivée

Alors que l’air est frais, les premiers moments du Festival sont comme à l’habitude : forestiers et avec un goût de début de vacances. Les premiers concerts démarrent déjà, tout le monde est en joie et en forme, il est temps de s’y mettre. Notre premier moment fort vient avec l’arrivée d’Idles, leur set sans concession et leurs avis aussi. Des partis pris francs, explicites, un refus de la haine et les termes sont dits. Profitons-en, peu nombreux·ses sont celleux qui le ferons sur ces quatre jours. On s’ambiance ensuite devant SCH puis Bring Me The Horizon et sa scénographie impressionnante. Enfin, on se retrouve devant Justice et son electro majestueuse. Déjà beaucoup de variétés, de découvertes et de partage. Il s’agira de lisser l’effort pour ne pas tomber de fatigue avant la fin, en tout cas on a déjà pris nos marques, sympathisé avec les bénévoles et la sécu, et on attend la suite avec impatience !

Vendredi 5 Juillet – Le décollage

Pour ce deuxième jour, on commence à pouvoir encourager les jeunes artistes locaux. Jean ouvre avec sa musique remplie d’une énergie mélancolique avant de laisser la place à Hervé. Le chanteur, qu’on aurait attendu un peu plus tard, débarque sur la scène à cent à l’heure et son niveau d’énergie ne descendra pas de tout son set. Chapeau pour la performance, on était essoufflés rien qu’à le voir courir partout. Le temps d’aller boire un petit coup et d’aller se restaurer à l’un des nombreux et variés stand de nourriture (définitivement l’un des bons points du festival, il y a de tout et pour tous les régimes alimentaires), et on se retrouve déjà à s’ambiancer sur les tubes d’hier et d’aujourd’hui du seul et unique Étienne Daho, qui cache bien ses 68 ans et qu’on sent prendre beaucoup de plaisir en cette soirée du début d’été Normand. Sur cette même scène, on retrouve ensuite les Australiens de Parcels pour un concert coup de coeur comme ils ont l’habitude de savoir en faire. Dernier moment marquant du jour, le set de The Prodigy bien à l’ancienne mais sans en faire trop. On boucle une deuxième journée comme si de rien n’était, le temps file mais on essaie de profiter au maximum.

Samedi 6 Juillet – Le plat de résistance

Grosse journée pour ce samedi, les concerts s’étalent de 15 à 3 heures du matin soit 12 d’affilée ! Pour ne pas risquer l’indigestion, on se mouille la nuque et on prend des temps de repos. Ceci dit, on attaque directement avec Fishtalk dont le set nous a fait beaucoup de bien. Leur musique a quelque chose d’envoûtant et d’intime. On sent ces jeunes gens particulièrement concernés par le monde qui les entoure. Coup de coeur pour elleux.  S’ensuit le set de Fat White Family dont le trash a eu le don de réveiller les personnes qui auraient eu l’idée de faire une sieste, ou qui ne les connaissaient pas. Alors que la soirée s’installe, on enchaîne la chanson de Véronique Sanson, le Rap de Zola avant la pop de Zaho de Sagazan dont le set a semblé particulièrement toucher le public de Beauregard venu en masse. La symphonie des éclairs fut un moment suspendu particulièrement touchant et émouvant, alors que le ciel était d’un bleu sombre qui reflétait très bien la tenue de la jeune chanteuse. Enfin, peut-être le point culminant de ce festival avec la bande de James Murphy pour une apparition rare de LCD Soundsystem. Beaucoup d’amour en a découlé, beaucoup de fête et de danse, des morceaux longs et un moment de communion collective pour aller loin dans cette nuit de début d’été.

Dimanche 7 Juillet – La libération 

Pour terminer cette édition 2024 du festival, on a une nouvelle journée à rallonge. La date coïncidant avec le deuxième tour des élections législatives suite à la dissolution de l’assemblée Nationale, et le rassemblement national étant arrivé en tête du premier tour, cette journée, encore plus que les précédents, débutait avec une espèce de chape de plomb au-dessus des spectateurs et spectatrices. Vous n’êtes pas sans savoir à quel point, en plus d’être portée par la haine de la différence et le rejet de l’autre, l’extrême droite est dangereuse pour la culture et toutes les personnes qui y interviennent. Elle souhaite par exemple remettre en cause le statut d’intermittent du spectacle, acquis social indispensable et trésor d’exception Française. Sans elle, beaucoup moins d’artistes pourraient vivre de leur musique, beaucoup moins de technicien(ne)s, et donc beaucoup moins de festivals associatifs et indépendants pourraient continuer à exister. D’où une certaine tension, notamment en backstage, dont le point culminant fut cette journée du 7 Juillet. Ceci dit, peu d’artistes auront pris la parole à ce sujet, à l’exception notable de Flore Benguigui en ce jour de vote.

Mais revenons-en pour l’instant à notre festival. La journée commence avec notre chouchou Samba De La Muerte, local de l’étape et qui a eu la bonne idée de chasser la pluie qui semblait vouloir s’installer sur le site. Les morceaux de son nouvel album Ornament ont rempli l’espace avec quelque chose d’intemporel, une vague de chaleur qui n’est jamais facile à installer lorsqu’on ouvre une journée et que le public n’est pas encore présent en masse. Une petite pause ensuite, pour reposer les organismes qui commencent à être fatigués par l’enchaînement des journées, avant un  bel enchaînement entre Baxter Dury et sa pop so British un peu barrée, Yodelice et son Rock truffé de références à Pulp Fiction et L’Impératrice, donc la scénographie et le set nous ont franchement emballés (mention spéciale à la cover de Daft Punk qu’ils nous ont proposée en milieu de concert).

Arrive alors 20h. Les premières rumeurs semblent alimenter le feu de l’espoir, alors que les téléphones fonctionnent en rafraîchissement forcé. Lorsque les premiers résultats arrivent, l’émotion déborde très vite. Nombreuses sont les personnes qui ont vécu dans la peur ces dernières semaines, et qui ont le sentiment d’avoir enfin un résultat favorable à une élection. Les larmes coulent, les étreintes témoignent du soulagement. On en oublierait presque que pendant ce temps, le concert de Luidji a commencé et avec lui la dernière soirée de concerts.

On attrape un truc à manger, et on file voir Calogero. Les anciens tubes fonctionnent aussi bien que les derniers, le public est conquis et chante à l’unisson. L’ambiance est désormais vraiment festive, comme si le couvercle de la casserole avait été retiré et que tout le monde se sentait plus léger.

Marc Rebillet en profite, lui qui n’a jamais sa langue dans sa poche. Ce sera l’occasion de dépoussiérer le vieil hymne qui dit que la jeunesse emmerde le Front National, et de vider la jauge d’énergie restante en face des fontaines de flamme. Dernière étape, Massive Attack qui eux aussi savent être vocaux même si le registre et l’énergie n’est pas la même. Merci pour leurs prises de paroles, nécessaires et fédératrices.

On prend alors peu à peu la direction de la sortie, on salue une dernière fois l’équipe du festival, les bénévoles, la sécurité qui nous ont permis de vivre un très beau moment, on parcours une dernière fois le chemin qui nous ramène à l’entrée et on fait un dernier tri des photos avant de se coucher.

Merci Beauregard, on reviendra !

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