Deerhunter – Fading Frontier

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Ce qui est clair dès le départ, c’est que Deerhunter ne pourra pas faire mieux que le désormais culte et parfait Halcyon Digest en 2010 qui est considéré comme étant le meilleur album de cette décennie. Le groupe d’Atlanta a placé la barre tellement haute après quatre bons albums que la suite pouvait s’avérer moins mémorable que celui-là, notamment le très garage-rock Monomania en 2013. Pourtant, je le trouvais très bon ce disque mis à part les deux premiers titres noisy mais il a été considéré à tort comme le vilain petit canard dans la discographie du groupe. Et puis entre 2013 et aujourd’hui, tant de choses ont changé et leur nouvel album Fading Frontier est témoin de ce changement.

Beaucoup de choses se sont produits sur la planète Deerhunter, à commencer par le terrible accident de voiture de Bradford Cox, leader du groupe complètement névrosé, survenu l’année dernière. Tout le monde le sait, il est atteint du syndrome de Marfan mais cet accident qui lui causera de graves blessures va le plonger dans une profonde dépression. Et bizarrement, on ne ressent pas cette dépression à l’écoute de ce Fading Frontier, premier album réalisé en quatuor (le guitariste Frankie Broyles a quitté la formation l’année dernière afin de poursuivre sa carrière solo). Ce disque est plutôt serein malgré la plume dépressive de Cox et s’éloigne de l’atmosphère poisseuse et étouffante de Monomania pour se rapprocher des ambiances célestes de Halcyon Digest. Est-ce à cause du fait que ce soit Ben H. Allen qui produise le disque ? Le mystère reste entier.

Avec la participation de Tim Gane, ancien membre de Stereolab, et de James Cargill du groupe Broadcast, Fading Frontier s’ouvre avec le très mélodique « All The Same » qui donne le ton de cet opus élégant. Il est suivi des bijoux pop « Living My Life », « Breaker » et « Duplex Planet » aux ambiances 80’s qui confirment le talent mélodique infaillible de Deerhunter. Tantôt dream-pop, pop rock, voire même funk sur le single jubilatoire « Snakeskin » avec son riff de guitare implacable et le chant insolent de Bradford Cox qui vient secouer l’auditeur, le résultat fait mouche à chaque fois. Le groupe d’Atlanta atteint même des sommets sur des titres plus oniriques comme « Take Care » avec son final absolument renversant, la folk spatiale et déstructurée « Leather And Wood » menée au piano et aux sonorités futuristes en arrière-plan sonore sans oublier « Ad Astra » résolument synthétique et planant.

« What’s wrong with me ? » s’interroge sans cesse Bradford Cox sur « Carrion ». Décidément torturé et loin d’être en paix avec lui-même, il n’empêche que lui et sa troupe de Deerhunter viennent de réaliser un nouveau chef-d’oeuvre qu’est Fading Frontier qui pourrait bien squatter les tops de fin d’année. Ceux qui auront été déçus (à tort) par Monomania seront réjouis avec cet album, et c’est tant mieux.

Note: 9/10