Anderson .Paak – Oxnard

Il n’y a plus à douter mais Anderson .Paak est devenu le type que le monde du hip-hop s’arrache à tout prix. Après avoir débuté en catimini quelques années plus tôt avec des sorties confidentielles, la hype autour de lui va s’accroître depuis ses contributions sur le dernier album de Dr. Dre en 2015. Suite à cela, « Breezy Lovejoy » va connaître la gloire avec un « premier » album intitulé Malibu résolument marquant en 2016 (chroniqué ici) ainsi que des sorties avec NxWorries avec le beatmaker Knxwledge avec Yes, Lawd! la même année (chroniqué ici). Et il n’est pas prêt de s’arrêter car voici venir Oxnard.

Maintenant qu’il est signé chez Aftermath, label de Dr. Dre connu pour lancer mais aussi détruire des carrières, le crooner soulful à la voix éraillée reste dans sa zone de confort en explorant à fond les manettes tout l’étendard et la puissance de la black music par excellence mais avec l’expertise du Docteur en personne. Ce dernier lui attribue tout de même des productions (accompagnés d’autres beatmakers mais anonymes comme Mell, Brissett et Dem Jointz) funky et fiévreuses comme « Who R U ? » et « Mansa Musa » en s’offrant le luxe de poser un couplet pour réaffirmer sa puissance et sa richesse dans la culture hip-hop (« Made a billion off my bullshit and did it, nigga, high as hell/Overachiever, nigga, I excel ») tandis que notre hôte alterne avec aisance chant et rap comme il a l’habitude d’en faire.

Tout au long d’Oxnard, Anderson .Paak (sans son groupe The Free Nationals) fait preuve de plus d’expérience et embarque son auditeur dans une odyssée résolument soulful avec une introduction des plus cinématographiques et blaxploitation qu’est « The Chase » conviant la divine voix de Kadhja Bonet suivi du très smooth « Headlow » narrant ses romances compliquées tout comme sur « Smile/Petty » où on a un certain béguin pour la seconde partie plus groovy et « Sweet Chick » avec une fois de plus le crooner BJ The Chicago Kid. Mais le chanteur/rappeur/batteur n’est pas que romantique, il sait aussi être ambianceur avec la tuerie disco-funk synthétique qu’est « Tints » qui se veut être le fils spirituel de « Am I Wrong ? » de son prédécesseur. Et nous n’avons pas ScHoolboy Q mais le grand Kendrick Lamar à la place qui signe un couplet plutôt honorable. Des guests, en veux-tu en voilà d’ailleurs avec Snoop Dogg qui se la joue nostalgique sur la très belle instru planante et mélancolique de « Anywhere », Pusha T qui rêve de grandeur et de puissance sur la prod trap impériale de « Brother’s Keeper » ou encore J. Cole implacable sur « Trippy ».

Mais la cerise sur le gâteau restera Q-Tip qui relate son deuil qu’il a dû faire suite à la tragique disparition du rappeur et son frère d’armes Phife Dawg sur le jazzy et lumineux « Cheers » tandis que Breezy Lovejoy s’ouvre volontairement sur le décès inattendu de son cher ami Mac Miller. Un pur moment d’émotion car derrière le côté swag, richesse et popularité se cache tout de même un homme au coeur tendre et résolument humaniste. Et Anderson .Paak nous le montre tout au long de ce Oxnard qui, soyons honnêtes, est inférieur à son prédécesseur car il manque un peu d’impact. Mais cela n’empêche pas de nous offrir de beaux petits moments comme la prod boom bap concoctée par 9th Wonder qu’est « Saviers Road » où il se met dans la peau d’un dealer ou encore « 6 Summers » qui montre le crooner californien plus engagé. Il n’empêche qu’il continue de toucher le sommet avec son mélange de hip-hop, disco, R&B, funk, soul et jazz avec un soupçon de modernité qui sera prêt à perdurer. Enfin si Aftermath continue à gérer son image, bien entendu…

Note: 8/10