The Smile – A Light For Attracting Attention

Il y avait six ans presque jour pour jour, Radiohead était revenu à leur meilleur niveau avec leur dernier album à ce jour du nom d’A Moon Shaped Pool (chroniqué ici). Le neuvième album placé sous le signe de la nostalgie et du deuil du groupe d’Oxford leur a permis de réclamer leur trône dans les plus grands groupes les plus influents de tous les temps. Suite à cela, on sait que l’avenir du quintet est plus que compromis avec chaque membre qui s’émancipe chacun de leur côté, avec Ed O’Brien qui a sorti son premier album lors du premier confinement entre autres (chroniqué ici). Mais depuis un an, un nom circule dans la Radioheadosphère: The Smile. Teaésé pendant toute l’année avec comme line-up Thom Yorke, Jonny Greenwood, Nigel Godrich (oui, c’est leur producteur mais c’est quand même le sixième membre du groupe à ce que je sache) et… Tom Skinner, batteur de Sons of Kemet, la formation fascine avec des prestations mémorables au festival de Glastonbury et des morceaux sortis au compte-goutte ces derniers mois. Et c’est ainsi que publie le premier album du supergroupe qui s’intitule A Light For Attracting Attention.

Le concept de supergroupe n’est pas nouveau pour Thom Yorke. Doit-on vous rappeler l’aventure Atoms For Peace ? Quoi qu’il en soit, on avait hâte de savoir ce qu’il allait nous proposer avec The Smile maintenant qu’il a redoré son blason avec sa bande-originale Suspirium (chroniqué ici) et son troisième (et meilleur) album solo Anima (chroniqué ici). Et bien, tout simplement parce qu’il a définitivement abandonné les expérimentations électroniques pour revenir à quelque chose de plus organique et plus libérateur que jamais, un peu comme si il poursuit ce qu’il avait entrepris sur A Moon Shaped Pool. Et on est en plein dedans dès le départ avec l’incroyable « The Same » qui a de quoi rappeler aussi bien « Everything In Its Right Place » que « Like Spinning Plates » avec ses loops obsédants et ensorcelants. Et justement le combo Yorke/Greenwood évite de tomber dans le piège Radiohead car Tom Skinner nous offre un bon condensé de jazz et de funk grâce à ces rythmes syncopés à l’approche de l’afrobeat sur « The Opposite » avec cette formule guitare-basse-batterie définitivement hypnotique qui permettent aux savants d’Oxford de sortir de leur zone de confort habilement. Et sah quel plaisir !

Tout simplement parce que The Smile convoquera de nombreuses influences musicales qui rappelleront les différentes épopées radioheadesques du passé mais avec un twist novateur. Ca fait toujours plaisir de voir Thom Yorke renouer avec le rock bien bourrin avec « You Will Never Work In Television » toutes guitares dehors et rythmiques explosives rappelant aussi bien « Electioneering » que « 2+2=5 » ou encore lorsqu’ils lorgnent vers des territoires post-punk avec les rugueux « Thin Thing » avec une progression crescendo dantesque mais consensuelle et « We Don’t Know What Tomorrow Brings » aux nappes synthétiques hallucinées sorties tout droit de « Where I End And You Begin ». A côté de cela, on saluera également les arrangements de cordes toujours aussi inspirés de Jonny Greenwood qui met en valeur sa patte cinématographique et ses travaux avec le London Contemporary Orchestra sur « Waving A White Flag » mais également les ballades mélancoliques et aériennes telles que « Open The Floodgates » et « Free In The Knowledge ».

Le supertrio (et Nigel Godrich) nous étonne tout au long de ce A Light For Attracting Attention où leur alchimie reste indéniable avec leurs bagages musicaux différents qui arrivent à s’unifier. On pense à « Pana-vision » avec ce décor cinématographique qui met en valeur la présence de Skinner mêlée aux arrangements somptueux signés Yorke/Greenwood dignes de « Suspirium » et de « Pyramid Song » ou bien encore le tourbillonnant « A Hairdryer » avec cette montée en tension palpable avant de redescendre avec élégance sur « Skrting On The Surface » qui est une conclusion vertigineuse et touchante. The Smile réunit donc ce côté hétéroclite qui avait fait de Hail To The Thief un disque imparable, de The King of Limbs un disque à part pour expérimentations abruptes et d’A Moon Shaped Pool un disque délicat et minutieusement arrangé. Sans oublier pour autant la patte de Tom Skinner qui ajoute un soupçon de jazz et de funk à travers ces instrumentations épurées et riches notables pour cette cohésion et cette densité indéniables faisant de ce A Light For Attracting Attention une œuvre absolument remarquable.

Note: 9.5/10