John Grant – Grey Tickles, Black Pressure

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Si John Grant avait marqué les esprits en tant qu’ancien frontman du groupe The Czars, sa carrière solo est malheureusement passé inaperçu. Ses deux albums solo The Queen Of Denmark en 2010 ainsi que l’électronique Pale Green Ghosts en 2013 étaient tout simplement des bijoux complètement sous-estimés. Dommage pour l’alcoolique/dépressif/toxicomane originaire du Colorado qui, par la suite, s’est exilé en Islande afin de vaincre sa dépression. Cette année, il présente son troisième Grey Tickles, Black Pressure à la pochette quelque peu malsaine avec un John Grant nous faisant un sourire inquiétant comme si il allait nous lancer un laser des yeux au calme. Ça va chier !

Il suffit de comprendre le titre de l’album pour se plonger dans le concept de l’album: « Grey Tickles » pour désigner la crise de la quarantaine dans le jargon islandais et « Black Pressure » pour l’équivalent du mot cauchemar en turc. Et le cauchemar, on y est en plein dedans dans l’intro où l’on entend le 1 Corinthiens 13, des versets 4 à 8 traduit simultanément en islandais et interrompu par des sonorités parasites inquiétants. Le chaos s’efface et laisse place au morceau-titre classieux et lyrique qui aurait pu figurer sur The Queen Of Denmark. Mais très vite, les choses sérieuses vont commencer.

Grey Tickles, Black Pressure (produit par John Congleton) contient pas mal de titres bien expérimentaux et complètement barrés où l’on aurait croisé Prince, Goldfrapp, Nine Inch Nails ou encore David Bowie des années 80 sur « Snug Slacks », « Guess How I Know », « Black Blizzard » ou encore l’électro-rock salopé de « You & Him ». Il suffit de voix distordus, des synthés industriels et de sonorités électro bien grasses pour nous mettre dans l’ambiance et de nous rappeler que John Grant reste un gue-din dans sa tête, et pas que dans son trailer. L’idée de vengeance est bien présente, notamment sur « Voodoo Doll » où il déballe tous ses fantasmes de vengeance aussi surréalistes que glauques tout comme le règlement de comptes hilarant et sanglant sur « You & Him ». A côté de ces monuments barrés vient tout de même de bonnes surprises comme les funky « Down Here » et « Disappointing » avec Tracey Thorn, légendaire chanteuse d’Everything But The Girl sans oublier les ballades bouleversantes de « No More Tangles » et « Geraldine » où John Grant se révèle à nous avec une profonde sincérité.

Après tout son lot de haine, de colère, de cynisme et de mal-être balancé sur ces onze morceaux, les versets 4 à 8 du 1 Corinthiens 13 sont récités de façon très claire et innocente sur l’outro qui clôt ce Grey Tickles, Black Pressure de façon optimiste. Il faudra plusieurs écoutes pour apprécier ce troisième opus mais une fois palpé, c’est toute une poussée énergétique que l’on se prend dans la gueule. John Grant a décidé de livrer toutes ses facettes afin que l’on puisse comprendre sa psychologie, et ce troisième opus nous touche en plein cœur.

Note: 8/10