Thom Yorke – Anima

A l’automne dernier, on a eu la très bonne surprise d’avoir une bande-originale de la part de Thom Yorke. Et c’était la première fois que le leader de Radiohead s’essayait à ce style tant son comparse Jonny Greenwood était un habitué dans ce format. Fin octobre, il nous livrait une sublime BO pour la réadaptation de Suspiria (chroniqué ici) et il avait déclaré qu’un nouvel album solo allait paraître dans un avenir proche. Connaissant son goût pour les surprises, ces derniers jours, il casse de nouveau les Internets en annonçant son nouvel album paru il y a quelques jours de cela nommé ANIMA avec en plus un court-métrage du même nom disponible sur Netflix réalisé par Paul Thomas Anderson. Plus rien ne m’étonne par les temps qui courent.

Thom Yorke avait déclaré que ce disque serait encore plus électronique que ses précédents albums qui étaient déjà bien électroniques. Anima (écrit et composé par ses propres soins et produit par son fidèle partenaire Nigel Goldrich) serait à la fois inspiré par l’inconscient et par la représentation féminine par l’imaginaire masculin. A travers ces neuf compositions (enfin dix si on prend en compte l’inédit « Ladies And Gentlemen, Thank You For Coming » disponible mi-juillet sur la version vinyl d’Anima), le leader de Radiohead nous embarque dans une odyssée musicale riche en loops inspirée par Flying Lotus mais également par Four Tet et Kraftwerk avec les vibes dance de l’introduction minimaliste nommée « Traffic » riche en infrabasses ou bien même « Twist ».

Inspiré par les expérimentations synthétiques réalisées sur scène aux côtés de Nigel Godrich, Anima se veut donc aussi bien labyrinthique qu’angoissé. Thom Yorke nous embarque des pulsations électroniques à coup de rythmiques saccadées à travers ces sonorités magnétiques avec entre autres « I Am A Very Rude Person » et « Not The News » en ruminant aussi bien ses hallucinations et sa solitude notamment sur « The Axe » avec son ambiance pas si éloignée de Suspiria (« Goddamned machinery, why don’t you speak to me ») conviant également Joey Warwonker d’Atoms For Peace. C’est à travers des ballades comme le dépouillé « Dawn Chorus » en convoquant les fantômes du passé mais encore les épopées kraftwerkiennes de « Last I Heard (…He Was Circling The Drain) ». On peut également citer les rythmiques complexes jouées par Phil Selway et la ligne de basse addictive de « Impossible Knots » qui ajoutent ce côté contemplatif du bonhomme d’Oxford ou bien même la conclusion nommée « Runawayaway » avec ses guitares bluesy et ses rythmiques dansantes dignes de Four Tet sans oublier la voix déformée de Thom Yorke répétant sans cesse: « This is when you know who your real friends are ».

Imaginez une fusion entre les expérimentations abstraites de The King of Limbs, les épopées d’Atoms For Peace et de Tomorrow’s Modern Boxes mêlées au packaging émotionnel de A Moon Shaped Pool et angoissant de Suspiria, vous obtiendrez un troisième album solo plus réussi et plus ambitieux de la part du charismatique leader de Radiohead. La cinquantaine passée, Thom Yorke continue de creuser le sillon à coups d’IDM cérébral tout en racontant ses névroses et ses angoisses qui le tourmentent. Pour le coup, il réussit à nous passionner.

Note: 7.5/10