Quoi de mieux que d’allier gospel et post-punk, soit deux antipodes musicales en même temps ? Et bien Algiers a su le faire sans difficulté. Le trio originaire d’Atlanta et composé du chanteur Franklin James Fischer basé à New York venant de la soul et du gospel, du guitariste Lee Tesche ainsi que le bassiste Ryan Mahan venant tous les deux du punk (et tous deux basés à Londres) arrive à mélanger diverses couleurs musicales afin d’en créer une atmosphère bien propre à eux. La preuve avec leur premier album éponyme.
Si l’on se réfère à leur site, Algiers se veut donc militant et protestataire avec une philosophie proche de Malcolm X, Angela Davis, Gil Scott-Heron ou même Public Enemy. Il est vrai qu’en écoutant leur premier opus, on ne peut pas s’empêcher de penser aux catalogues de la Motown des années 1970 (avec en tête le What’s Going On de Marvin Gaye), le proto-punk inquiétant de MC5 ou encore la furie synthétique de Suicide. Un peu comme Young Fathers, l’heure n’est pas à la fête pour Algiers car il lutte contre la discrimination raciale et expose les dernières bavures policières américaines en pleine figure (les assassinats injustes de Mickael Brown, Trayvon Martin, Eric Gardner, les émeutes de Baltimore, la tuerie à Charleston). Sur ces onze titres en ressort une atmosphère oppressante et tribale où Fischer pousse sa plainte vibrante venant du plus profond de son cœur, à l’image des lugubres « Remains » qui accuse une société pervertie par la télévision, « Claudette » ou même « And When You Fall ».
Tout n’est que tension durant ce premier album et elle n’est pas près de descendre quand on a des joyaux comme « Blood » avec ses chœurs spirituels émouvants et son avalanche sonique étourdissant, le menaçant « Irony.Utility.Pretext » avec sa rythmique rappelant furieusement le « Planet Rock » d’Afrika Bambaataa ou encore la soul rythmée et enlevée de « Black Eunuch ». Au milieu de ces complaintes sombres et furieuses surgissent tout de même quelques moments de répit avec le très beau « Games » ou encore la conclusion angélique « Untitled » samplant l’évangile « Wonderful » de Pastor T.L. Barrett & The Youth For Christ Choir nous rappelant que malgré toute la misère régnant dans ce monde, il reste tout de même une lueur d’espoir nous menant vers l’Eglise où il est important de se réfugier dans la prière.
Algiers réussit parfaitement son entrée en matière avec un premier album impressionnant. En plein cœur de la troublante actualité, ils arrivent avec génie à allier une musique limite industrielle rappelant la violence urbaine parsemé toutefois de chaleur organique. A l’écoute de cet opus, on a l’impression d’assister à une messe futuriste et apocalyptique mais nous rappelle tout de fois que dans la vie, il y a l’espoir et la spiritualité.
Note: 8/10
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