Warpaint – Heads Up

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Personne ne pouvait prédire à un éventuel comeback de Warpaint en cette rentrée. Et pourtant, c’est bel et bien officiel. Tout a été dit, je crois, lorsqu’il s’agit du second album éponyme du groupe californien en 2014 avec ses désormais cultes « Love Is To Die », « Keep It Healthy » et autres « Disco//Very ». Suite à cela, une longue tournée mondiale s’en est suivie et les mamzelles ont failli se séparer définitivement avant de revenir à la raison. Durant ce laps de temps, Emily Kokal a prêté sa voix sur l’album de Saul Williams, Theresa Wayman a monté son petit groupe BOSS et a travaillé sur un album solo aux côtés de Dan Carey (à paraître prochainement si Dieu le veut), Jenny Lee Lindberg s’est offerte une escapade en solo nommé right on ! (chroniqué ici) et Stella Mozgawa a été la plus prolifique de tous en collaborant avec Kurt Vile, Cate Le Bon, Jamie XX, Kim Gordon. Personne ne pensait qu’elles allaient sortir un troisième album mais pourtant c’est bel et bien le cas et il s’intitulé Heads Up, produit par Jacob Bercovici (producteur du premier EP du groupe Exquisite Corpse en 2008 et bassiste du groupe Julian Casablancas + The Voidz).

En août dernier, Warpaint a dévoilé sa « New Song », premier extrait de ce Heads Up. Et plusieurs questions ont traversé mon esprit: pourquoi ? Les Californiennes veulent-elles virer au mainstream ? Où sont les guitares ? C’est quoi ces bruits chelous en début de morceau ? C’est quoi le but au juste ? C’est quoi ses paroles banales ? Vous voulez vraiment passer sur RTL 2 ou RFM les meufs ou quoi ? Est-ce que je dois monter une cellule de soutien psychologique ? Comment peut-on passer d’un chef-d’oeuvre à « No Way Out » à ce… truc ? C’est donc ça la « version mature de Warpaint », comme tu le dis Jenny ? C’est quoi ce bordel ? Pourquoi le ciel est bleu ? Pourquoi l’on vit mieux à deux ? Pourquoi l’argent et le pouvoir rendent les amis dangereux ? On dit « jif » ou « gif » ? Autant vous dire que j’étais décontenancé et que j’avais peur que ce troisième opus soit dans le même acabit. Et puis au final, l’écoute de ce troisième album m’a ramené à la raison.

« Whiteout » ouvre le bal et nous voilà rassurés: Warpaint n’a rien perdu de son charme. Quel bonheur de retrouver les arpèges de guitare, les rythmiques nonchalantes et groovy amenées par la magique Stella et la voix angélique d’Emily. On a parfois même l’impression de revenir à l’ère de The Fool par momentsk, tout comme « By Your Side » aux arrangements qui pourraient faire penser à du Bjork période Homogenic où la très jolie Theresa nous susurre « I’ve got my girls, I’m not alone ». La solidarité féminine avant tout. Mais la véritable MVP de l’album restera Stella Mozgawa car elle nous montre toute sa dextérité et sa versatilité. Elle est capable de ramener des rythmiques quelque peu dansantes sur les envoûtants « The Stall » au riff de guitare funky et « So Good », deux morceaux qui sont de purs concentrés de dream-pop résolument aventureux. Comme sur son prédécesseur, les Californiennes continuent à clamer leur amour pour le hip-hop. Si Warpaint nous présentait « Biggy », Heads Up nous présente « Dre », en hommage au fameux docteur et même si c’est ni très funky ni gangsta non plus, ça vaut son pesant d’or pour sa dose de sensualité.

Là où Emily et Theresa se partagent le mic selon les morceaux, Jenny Lee Lindberg continue ses prouesses vocales et s’offre un titre en solo et il s’agit de la sublime ballade folk psychédélique « Don’t Let Go » qui prend de l’ampleur au fur et à mesure que le morceau progresse. Donc oui, Warpaint s’affirme de plus en plus et assume de plus en plus ses influences musicales, même si tout n’est pas parfait bien évidemment. La ballade mélancolique nommée « Today Dear » viendra mettre malheureusement fin au sublime voyage que nous propose les Californiennes qui partent la tête haute. Heads Up viendra confirmer le statut des quatre demoiselles qui sont là pour nous proposer son lot de nouveautés et d’expérimentations tout en restant fidèle à son style envoûtant et quelque peu sombre par moments.

Note: 8/10