Ce qui est sûr, c’est que Crumb n’a laissé personne indifférent ces dernières années. Le quatuor de pop psychédélique de Brooklyn a marqué les esprits avec leurs premiers EPs et a atteint des sommets avec leurs deux excellents premiers albums à savoir Jinx en 2019 (chroniqué ici) et Ice Melt deux ans plus tard (chroniqué ici). En s’implantant sur la scène avec leur musique hallucinogène, onirique et cinématographique, le groupe est devenu un incontournable et forcément, ils étaient attendus au tournant avec leur successeur tant attendu du nom d’AMAMA une fois de plus produit par Jonathan Rado.
Lila Ramani (chant, guitare, synthés), Bri Aronow (synthés, saxophone), Jesse Brotter (basse) et Jonathan Gilad (batterie) retroussent leurs manches et nous entraînent dans un nouveau tour de magie musicale dès le départ avec un « From Outside A Window Still » enchanteur. Crumb nous accueille dans leur périple parsemé de questionnements existentielles avec leur envie de rester dans leur zone de confort (« Home is what I want and what I need », chante-t-elle) à travers cette ambiance spatiale et hantée parsemé de samples de charges statiques d’une radio de police avant de récidiver avec l’aventureux « Side By Side » où ils concilient shoegaze aux synthés étincelants et breakbeats dignes d’Aphex Twin tandis qu’elle relate les sacrifices qu’elle a faites pour son (ex-)partenaire en vain (“I change myself, degrade my health for you, for you so you can keep on doing well / We made this thing a mess, I drank away the stress”, chante-t-elle). Vous l’avez compris, ce AMAMA s’annonce absolument haletant.
La pop psychédélique trippy aussi bien onirique que fantasmagorique continuera d’atteindre de nouveaux sommets avec chaque membre qui brille de plus en plus. On appréciera de plus en plus la voix beaucoup plus vaporeuse et hantée que jamais de Lila Ramani ainsi que son storytelling parsemé de doutes, de regrets et d’angoisses permanents comme sur le morceau-titre où elle samplera la voix de sa grand-mère chantant en malayalam sans oublier « The Bug » volontairement dissonnant mais ô combien catchy et l’excellent et catchy « Genie » aux relents nocturnes. En empruntant des influences aussi bien trip-hop avec le psychédélique « (Alone In) Brussels » que jazz grâce à l’incroyable sens du rythme de Jonathan Gilad brillant sur « Crushxd » qui est un hommage à une tortue qu’ils ont involontairement écrasé sur la route (avec la poésie pleine de remords de la part de Lila Ramani qui vaut le détour) mais aussi sur des moments tantôt hypnotiques tels que « Sleep Talk » tantôt aventureux sur « Dust Bunny » aux breakbeats fascinants et aux instrumentations claires-obscures et sur la conclusion plus expérimentale du nom de « XXX » prenant de l’ampleur avec ses percussions glitch détaillant la recherche de confort que la chanteuse et guitariste cherche tant.
Vous l’avez compris, AMAMA est une incroyable aventure musicale de la part de Crumb. Le quatuor de Brooklyn a réussi à élargir leurs horizons musicaux afin de nous offrir un périple aussi bien rêveur que fantasmagorique où les questions existentielles et la quête de sérénité de Lila Ramani sont mises en avant sur des compositions plus audacieuses et hantées que jamais, même si on aurait aimé que leur collaboration avec Melody’s Echo Chamber soit présente sur ce disque. Nous avons affaire ici à un troisième chef-d’œuvre d’affilée pour un des groupes les plus intrigants de ces dernières années.
Note: 9/10