Avant que la fin du monde n’éclate, Russian Baths avait débarqué dans nos ondes avec leur incroyable premier album du nom de Deepfake (chroniqué ici). Le duo composé de Jess Rees (chant, guitare) et de Luke Koz (chant, guitare) a rendu la fin de l’année 2019 encore plus glaciale avec ce subtil mélange entre noise-rock, shoegaze et hardcore pour en faire un disque morbide et nihiliste mais ô combien irrésistible. Il aura fallu attendre quatre années et demi pour avoir la suite avec un second disque tant attendu du nom de Mirror.
La raison pour laquelle on a attendu tant de temps pour un second disque est tout simplement parce que Jess Rees est également membre du superquatuor underground Activity. Pendant que Luke Koz se tournait les pouces, la guitariste a pu donner naissance à deux excellents albums (chroniqués ici et ici) avec ses autres acolytes, à savoir Travis Johnson et Steven Levine, ex-membres de Grooms, ainsi que Zoë Browne qui est remplacée par Bri DiGioia. Mais trêve d’impatience, elle n’a pas tourné le dos à Russian Baths car elle et son compadre retroussent leurs manches en plongeant de nouveau dans de sombres abysses avec Mirror. S’ouvrant sur un « Vision (Dexedrine) » plantant le décor, le noise-rock granuleux laisse place à des influences beaucoup plus post-punk qui se font également entendre sur « Split » et « Bind » toujours aussi riches en tension.
C’est en s’éloignant des influences dignes de Washington digne des années 1980 et de Sonic Youth pour aller puiser du côté de Blonde Redhead ou encore de Spirit Of The Beehive que Russian Baths sait se réinventer. Malgré une production plus clean, l’atmosphère lugubre et inquiétant règne toujours en maître avec ces rythmiques tapageuses et ces riffs ensorcelants qui font des merveilles sur « Furnace » et « Purgatory » entre autres. Le duo de Brooklyn réussit à maintenir cette montée en tension permanente tandis qu’ils se détachent de tout ce qui pourrait leur aliéner sur le plan aussi bien personnel que sociétal avant de combattre leurs démons les yeux dans les yeux avec des moments effrontés à l’image de « Secret Keys » et de « Pair » avant d’enfoncer le clou avec ce solo de guitare riche en distorsions magistral de la conclusion frontale qu’est « Confess » en guise de clou du spectacle.
Volontairement moins heavy que Deepfake mais toujours aussi grave et nihiliste dans ses propos, ce nouvel album de Russian Baths est une parfaite démonstration musicale. Assumant définitivement ses influences post-punk tout en accueillant des légères touches baroques, le duo de Brooklyn réussit à toucher son auditeur à travers des compositions viscérales et cryptiques où le double sens est le maître mot tout au long de Mirror.
Note: 9.5/10