Pitchfork Avant-Garde 2018

Chaque année en fin de mois d’octobre, le Pitchfork Music Festival se délocalise à Paris. Mais avant le grand festin musical qui se déroule à la Grande Halle de la Villette, un apéritif se passe dans tout le quartier de Bastille nommé le Pitchfork Avant-Garde. Pour les nuls, il s’agit tout simplement de mettre en avant les talents de demain sélectionnés avec grand soin par le magazine musical influent. Les 30 et 31 octobre dernier se répartissaient dans sept salles différents pas mal de talents et découvertes musicales.

Sam Evian à la Chapelle des Lombards – Crédit photo: Florian Soni Benga.

Alors bien sur, faire tous les artistes/groupes dans les sept salles, c’est tout simplement mission impossible pour tous. A moins d’être maso ou un coureur. J’ai établi mon parcours et croyez-moi que c’était une putain de prise de tête où j’ai du faire des concessions et des sacrifices etc. Bref, vous voyez le genre ? Quoi qu’il en soit, j’ai commencé mon itinéraire à la Chapelle des Lombards pour le premier set qui est celui de Sam Evian. Rescapé de ses Celestial Shore, le natif de Brooklyn est venu défendre son dernier album You, Forever sorti en juin dernier (chroniqué ici). Accompagné de son live-band, il a envoûté la petite salle avec sa folk-rock paisible et doucement slacker faisant le tour de l’Amérique à travers des titres comme « IDGAF », « I Remember » et autres « Country ». Ce voyage musical était de courte durée certes mais résolument charmant.

Weakened Friends au Réservoir – Crédit photo: Florian Soni Benga

Mais à peine le concert fini, j’ai du foncer à vive allure à la salle du Réservoir pour partir à la rencontre de Weakened Friends à 19h45. Ce mois-ci, le trio de Portland avait publié son premier album Common Blah chez Don Giovanni Records (chroniqué ici) et a fait escale à Paris pour leur première fois. Et comme il fallait s’y attendre, le groupe a envoyé une sacrée patate et énergie avec un set bien furieux et électrisant comptant « Miserable », « Blue Again » ou même « Common Blah ». Cela aurait été un concert légendaire si ils ne se seraient pas trouvé devant une quinzaine de personnes dans la salle. En même temps, c’est normal, c’était que le début de la soirée, les gens viennent à peine de débarquer.

Hop Along au Supersonic – Crédit photo: Florian Soni Benga.

Le véritable plat de résistance était à 20h au Supersonic pour la première tête d’affiche qu’est Hop Along. Le quatuor de Philadelphie mené par la charismatique Frances Quinlan fait escale à la capitale pour leur dernier album Bark Your Head Off, Dog (chroniqué ici) et devant une salle bondée cette fois-ci, c’était l’extase absolue. Enchaînant avec précision les morceaux du dernier album (« Hop Simple », « Fox In Motion », « Somewhere A Judge ») et d’autres plus anciens (« Waitress », « The Knock »), la voix bien rugueuse de Frances Quinlan retentit bien tandis que les musiciens sont en parfaite osmose. C’était le coup de foudre assuré !

Stella Donnelly à la Chapelle des Lombards – Crédit photo: Florian Soni Benga.

Après un set pour le moins mémorable, il fallait redescendre sur Terre. Et bien, c’était pas prévu de sitôt car je suis retourné à la Chapelle des Lombards juste après pour assister au set de Stella Donnelly. La jeune musicienne australienne avait publié son tout premier EP Thrush Metal il y a moins d’un an et réédité chez Secretly Canadian quelques mois plus tôt (chroniqué ici). Seule accompagnée que de sa guitare et de ses quelques pédales d’effet, elle illumine la minuscule salle avec ces morceaux déjà connus par les aficionados (« Boys Will Be Boys », « Mechanical Bull ») en partageant des anecdotes plutôt marrantes sur ces chansons. Nous voilà sur un petit nuage avec elle et on n’est pas prêt de redescendre de sitôt.

ALASKALASKA au Réservoir – Crédit photo: Florian Soni Benga.

Pour le dernier set de la soirée (parce que bon, j’en avais un peu marre de taper des sprints), je suis retourné au Réservoir où c’était beaucoup plus rempli. Et j’ai donc assisté au set d’ALASKALASKA, groupe londonien qui avait publié un premier EP mais qui s’est fait une réputation scénique. Mêlant art-pop et sonorités jazz, le sextet hypnotise la salle en dévoilant les titres de l’EP sous un format incandescent, le tout mené par la voix de Lucinda John-Duarte qui éblouit comme jamais. Et c’est ainsi que s’achève la première journée de l’Avant-Garde enfin pour moi en tout cas.

Helena Deland à la Chapelle des Lombards – Crédit photo: Florian Soni Benga.

Pour le deuxième jour, en ce soir d’Halloween, tout le monde s’était déguisé sauf moi. En déambulant le quartier de Bastille, pas mal de gens étaient grimés et surtout le premier acte que je vais voir qu’est Helena Deland. J’en parlerai plus tard dans mes colonnes mais la musicienne canadienne accompagnée de ses musiciens (eux aussi grimés) étaient venus défendre son premier bébé paru il y a quelques semaines déjà. La collaboratrice de Men I Trust et de Jesse Mac Cormack nous a offert ses compositions à mi-chemin entre indie folk et dream-pop avec des arrangements sur mesure fournis par son live-band. De quoi bien démarrer la série.

Madison McFerrin au Supersonic – Crédit photo: Florian Soni Benga.

Direction le Supersonic maintenant pour partir à la rencontre de Madison McFerrin. Vous savez, la fille du légendaire Bobby McFerrin qui a signé le fameux « Don’t Worry Be Happy » ? Et bien après son frère Taylor (qui nous avait étonné avec son album Early Riser en 2014), l’heure est venue pour la cadette de se lancer en solo. Et elle a choisi le Pitchfork Avant-Garde pour présenter ses compositions soul DIY inouïes. En chaussettes, l’Américaine n’était armée que de son iPhone et d’une machine à loop où elle hypnotise la foule avec sa voix et ses claquements de doigt tout en ironisant sur la situation sociopolitique américaine actuelle. Le moment fort est lorsque la foule se met à chanter avec elle pour qu’elle puisse enregistrer sur sa machine à loop pour provoquer ce sentiment de communion et de fraternité. A peine, les dernières notes de son fameux tube « No Time To Lose », il est l’heure de retourner à la Chapelle des Lombards.

Gold Star à la Chapelle des Lombards – Crédit photo: Florian Soni Benga.

Après Helena Deland, c’est au tour de Gold Star dont j’ai touché deux mots il y a quelques mois ici. Venu défendre son dernier album Uppers & Downers, Marlon Rabenreither a plutôt joué sur la sobriété. Accompagné de son band, l’auteur-compositeur-interprète californien a su enchaîner un set direct et entraînant nous emmenant dans un road-trip aux quatre coins de l’Amérique et la salle était pleine à craquer. Malheureusement, je n’ai pas fait long feu car je suis retourné au Supersonic juste après.

Hatchie au Supersonic – Crédit photo: Florian Soni Benga.

La raison officielle ? Hatchie. Souvenez-vous de cette jeune australienne considérée comme étant la pure prodige de la scène indie pop actuelle avec son premier EP paru en mai dernier (chroniqué ici). Pour sa première date parisienne, la chanteuse et bassiste est accompagnée de deux guitaristes et un batteur et sont venus envoûter la salle qui était lors pleine à craquer. Sa dream-pop synthétique stellaire et lunaire aux airs des années 1980-1990 nous a conquis en alternant les tubes de son EP (« Sugar & Spice », « Bad Guy », « Sleep ») et des titres inédits comme « Her Own Heart » et « Without A Blush » à paraître d’ici peu. A part l’éclairage bien foireux, j’ai plutôt bien aimé l’ensemble.

SASAMI au Réservoir – Crédit photo: Florian Soni Benga.

Maintenant direction le Réservoir pour partir à ma découverte que j’attendais le plus de cette édition de l’Avant-Garde: SASAMI. Pour ceux qui ne la connaissent pas encore, il s’agit du nouveau nom du projet de la californienne Sasami Ashworth, ex-membre du groupe Cherry Glazerr et qui a collaboré également avec Hand Habits ou encore Wild Nothing. Désormais en solo, elle (ainsi que son batteur et bassiste) présente ses nouvelles compositions indie rock pour les moins décapantes (tout d’abord, en poussant un cri de monstre pour commencer le show et rappeler au public que c’est par ici que ça se passe). Signée chez Domino Records, la californienne a laissé personne indifférent tandis que son live-band arrive à nous convaincre que le futur projet sera en béton, n’atteste ses titres « Callous » et « Not The Time ».

Yuno au Supersonic – Crédit photo: Florian Soni Benga.

 

Et pour mon dernier concert de cette édition, je suis donc retourné au Supersonic pour retrouver une autre tête d’affiche qui était donc Yuno. Révélé en début d’année, la nouvelle coqueluche du label Sub Pop a posé bagage à la capitale pour présenter son premier EP Moodie (chroniqué ici). Le musicien et producteur de Jacksonville aux drôles de dreadlocks accompagné de son live-band a donné une prestation honorable devant une foule de plus en plus remplie (à un tel point que les gens qui faisaient la queue n’ont pas pu y assister, sale histoire…). De « Amber » à « Fall In Love » en passant par le furieux « Why For », son mélange d’emo, indie rock et hip-hop/R&B a plutôt conquis même si il manquait un petit truc pour relever le niveau. Et en guise de rappel et de conclusion, toute la foule s’est tout de même mise à chanter son fameux tube « Not Going Back » à tue-tête. De quoi clore ces deux journées de folie sur une note plutôt satisfaisante. Restez branchés pour mon live-report complet du Pitchfork Music Festival à La Grande Halle de la Villette qui arrive bientôt.