Let’s Eat Grandma – I’m All Ears

Il y a deux années de cela maintenant, le monde est tombé sous le charme de l’étrange duo Let’s Eat Grandma avec leur premier album I, Gemini que l’on peut estampiller de classique instantané (chroniqué ici). Jenny Hollingworth et Rosa Walton se connaissent depuis leur tendre enfance et ont mis le monde à leurs pieds avec leur pop expérimentale faussement féérique et cinématographique. Mais après avoir atteint le sommet, à quoi peut-on s’attendre avec leur successeur intitulé I’m All Ears ?

Pour Let’s Eat Grandma, hors de question de se répéter. Fini l’univers faussement féérique de I, Gemini, les deux adolescentes britanniques ont décidé de changer de fusil d’épaule. Et cela s’entend dès l’introduction bien immersive de « Whitewater » qui est suivie par le single pop percutant et cadencé nommé « Hot Pink » produit par la DJ transgenre SOPHIE (celle qui a produit le fameux « Yeah Right » de Vince Staples l’an dernier) où les influences trap et indus se font ressentir. Elle en remet une couche avec le plus délicat et moins expérimental « It’s Not Just Me » mettant en avant les interprétations élastiques du tandem Hollingworth/Walton qui prennent leur revanche sur leur passé.

Hormis SOPHIE, Let’s Eat Grandma peut également compter sur Faris Badwan de The Horrors mais également David Wrench qui, lui, est le principal producteur de cet opus offrant une définition pour la moins tordue de la pop music qui sied parfaitement au duo. Le tandem en profite pour nous balancer ce qu’elles ont sur le cœur, entre ruptures sentimentaux et cette sensation de se sentir mal-aimé sur « Failing Into Me » où les nappes synthétiques aériennes font corps avec les beats métalliques et explosifs et sur le plus ensoleillé « Snakes & Ladders » qui s’assombrit au fur et à mesure tandis que les interprétations des deux protagonistes se font plus inquiétantes et denses mais également troubles mentaux sur « Ava » également.

Tandis que les arrangements musicaux se font beaucoup plus simplistes que sur leur prédécesseur (comme l’atteste les interludes musicaux de « Missed Call (1) » et de « The Cat’s Pyjamas »), on se laissera ensorceler par ses nappes synthétiques éthérées et ses compositions synth-pop qui se font plus apaisées par la suite notamment avec « I Will Be Waiting » et le progressif « Cool & Collected ». Il faudra attendre le final dense et épique du nom de « Donnie Darko » qui traite sur la santé mentale pour crier de nouveau au génie en raison de sa progression qui vire aux allures plutôt discoïdes qui ne fait pas de mal. Avec I’m All Ears, Let’s Eat Grandma a franchi un nouveau cap en se réinventant sans jamais désorienter son auditeur. Peut-on parler de maturité jusqu’à présent ? Quoi qu’il en soit, on est tout ouï de voir comment le duo va évoluer d’ici peu.

Note: 10/10